Microbrasserie

Arnaud Laconte, professeur Inter Wine & Dine et connaisseur du milieu brassicole, tente de situer où se trouve le point de saturation du marché des microbrasseries.

Le marché de la bière de microbrasserie connaît une expansion formidable à travers le monde ces dernières années. Arnaud fait le point sur ce marché si prometteur et déjà plus avancé que ce qu’on pourrait croire.

Une microbrasserie ?

La définition ne fait pas l’unanimité et on peut facilement discuter de brasseries radicalement différentes sous la même dénomination. Le critère de choix sera celui des volumes annuels de production.

Tout d’abord, la microbrasserie peut être définie par opposition à la brasserie industrielle. Si on définit la brasserie industrielle comme produisant plus de 100 000hL annuels, la microbrasserie regroupe toute brasserie se trouvant en dessous de cette limite.

L’échelle peut être affinée davantage, considérant qu’une brasserie proche de 10^7L/an ne joue pas dans la même catégorie que la microbrasserie produisant 10^5L/an ou que la pico-brasserie à 10^3L/an qui est proche du brasseur amateur. Ainsi, pour des besoins de simplification, la « microbrasserie » désignera dans cet article toute brasserie au volume annuel inférieur à 100 000 hL.

Surfer sur la vague pour les industriels

Premier constat : ce marché florissant suscite l’intérêt des industriels du secteur. Il est de bon ton pour un industriel de la bière de compléter sa gamme (souvent composée de pils) par des produits plus qualitatifs et sortant de l’ordinaire. De plus que les marges sur ces bières haut de gamme sont supérieures aux produits d’appel.

Ensuite, il est important de savoir qui détient le matériel qui produit la bière à proprement parler. Est-ce un véritable microbrasseur indépendant qui a lui-même physiquement rempli sa cuve avec l’eau de la source locale? Ou est-ce un nom commercial derrière une recette brassée à façon dans une autre ville ? Détail qui a toute son importance quand on connaît l’influence décisive des minéraux contenus dans l’eau sur le goût du produit fini.

Une bulle ?

L’ampleur du « phénomène microbrasserie » semble gigantesque. Prenons une période de cinq années pour estimer cette augmentation selon certaines régions. D’abord, en Outre-Atlantique avec les Etats-Unis qui voient leur nombre de microbrasseries presque doubler (+89% de 2008 à 2013), de même qu’au Québec (+80%% de 2011 à 2016). Ensuite, en Europe avec une expansion impressionnante notamment en Italie (+131% de 2008 à 2013) et en France (+339% de 2008 à 2013) ; pays pourtant au lourd héritage vinicole. À noter que ces chiffres rendent compte du nombre de microbrasseries, non des volumes produits par ces dernières.

La Belgique a encore de la marge

Dans ce contexte, la Belgique, pourtant pionnière de la microbrasserie, a encore de la marge d’expansion avec 16 microbrasseries par million d’habitants en 2016 quand la Nouvelle-Zélande tourne autours de 35 et la Suisse en compte jusqu’à 49 ! Encore une fois, ces chiffres impressionnent mais doivent être pondérés par les volumes (information difficile à se procurer globalement, liée au secret professionnel).

Un label

Dans tout ce fouillis et à l’heure d’une expansion sans précédent, des voix s’élèvent pour un label international (du moins européen). Plusieurs initiatives, souvent locales ou régionales, ont vu le jour pour tenter de se démarquer.

Les microbrasseries ont plus que jamais besoin d’une définition univoque et d’un label fort et universel pour lever toute ambiguïté sur leur origine, se démarquer des grands groupes et s’afficher avec transparence auprès des consommateurs de plus en plus nombreux.

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